(kit) history is made at night

Kit était mal à l’aise de s’être autant ouvert à Aubrey. C’était pourquoi il avait préféré changer de sujet, plaisantant ainsi sur son animal de compagnie. Une plaisanterie à laquelle la chanteuse répondit sans problèmes. Pour continuer à faire diversion, le brun vint ouvrir la cage et glisser Matt sur son épaule ; le cochon d’inde vint aussitôt se loger dans le col de sa chemise à carreaux, l’un de ses endroits fétiches. « Tu veux qu’on se lance un film ? », proposa Kit. Il n’avait pas envie qu’elle s’en aille. Il voulait profiter. Après tout, Aubrey était venue à lui, c’était un instant à savourer avant qu’elle ne s’en retourne auprès de son fiancé. Cette simple pensée mettait Kit sans dessus – dessous. Ce qu’il éprouvait ? De la jalousie, indéniablement. Kit alla se vautrer dans son canapé en soupirant, observant la jeune femme et attendant qu’elle vienne le rejoindre. « J’ai investi dans un truc génial et révolutionnaire : Netflix ! », fanfaronna le pianiste en rigolant. Il se cala confortablement dans son canapé, en tailleur, portant sa main à sa nuque pour caresser Matt tout en tendant l’autre, dans laquelle il tenait la télécommande, à Aubrey, l’incitant à venir se poser. « Je te ramènerai après le film, on sait jamais dans les rues tard le soir… », lança-t-il. Jamais une femme n’était montée sur sa moto, sa précieuse.

Elle resta surprise de sa proposition. Rester là, regarder un film, avec lui. Seuls. Aubrey le fixa alors qu'il s'installait sur le canapé, et elle se questionna un instant sur la question. Elle voulait resté, bien entendu. Elle voulait rester un peu plus avec ce garçon si intéressant et absolument irresistible. Mais elle était là alors que Niels était sûrement à la maison, peut-être en train de l'attendre, bien qu'elle en doutait assez. Elle décida finalement de laisser parler son coeur et tout son corps qui lui dictait d'aller s'asseoir près de Kit et du petit Matt. Elle s'assit, légèrement tendue, et prit la télécommande en allumant la télévision. — Seulement si tu choisis ce qu'on met, annonça-t-elle avec un léger sourire. Aubrey avait beau adorer le cinéma et les films en général, elle était incapable de choisir lorsqu'elle se mettait devant la télé. C'était une indécise, tout le monde le savait. Elle ne pu s'empêcher de relever que Kit proposait de la raccompagner. Elle n'allait pas refuser. Déjà, parce qu'il allait être tard, et qu'elle n'aimait pas trainer dans les rues si tard, même si St Mawes n'était qu'une petite ville sans trop d'histoires. Puis, parce que ça lui permettrait d'être avec lui un peu plus longtemps, avant de retourner à son quotidien qu'elle tentait si bien d'éviter depuis des semaines déjà.

Kit se retrouva bien dépourvu lorsqu’Aubrey lui ordonna de choisir le film. Il ne connaissait pas ses goûts et il n’avait pas envie qu’elle s’ennuie. Il navigua distraitement sur le menu de Netflix avant de finalement opter pour quelque chose qu’ils adoraient tous les deux : la musique. C’est ainsi qu’il lança le reportage sur Nina Simone, une artiste incroyable dont le talent faisait l’unanimité, qu’importe le style musical. Pour sa part, Kit faisait de la pop rock ou, comme le disait son colocataire pour l’ennuyer, de la soupe commerciale. (…). Il hésita longuement avant de tenter tout rapprochement physique et finalement, sous l’excuse de laisser gambader Matt le long de son bras, il étendit ce dernier par-dessus les épaules de la chanteuse. Matt, profitant de cette liberté, en profita pour aller se réfugier dans le cou de la jeune femme. Kit se tortilla pour le récupérer, conscient que cela pouvait déplaire à certains. Il était proche d’elle, beaucoup trop pour que ce soit supportable et lorsqu’il leva les yeux, son regard se posa sur sa bouche naturellement rosée et pulpeuse. Kit se mordit la lèvre inférieure. C’était une tentation sans nom. Il se redressa, s’éloignant, le regard toutefois toujours rivé sur la bouche d’Aubrey alors que le film s’achevait. Kit s’éloigna plus franchement en entendant la porte d’entrée. Il tourna la tête, voyant apparaître son meilleur ami et une jeune femme, s’embrassant peu farouchement. « Eh merde ! », jura son colocataire en le voyant, pensant visiblement avoir l’appartement pour lui seul. « J’allais ramener Aubrey, c’est rien, on vous laisse », répondit Kit, habitué à ce genre de situation. Il replaça Matt dans sa cage avant de se diriger vers le petit placard dans le salon pour sortir un blouson de moto pour Aubrey ainsi qu’un casque.

Aubrey était bien trop concentrée sur le documentaire que Kit avait choisi pour penser à autre chose. Lorsqu'il s'agissait de musique, elle avait tendance à oublier tout le reste. Les garçons étaient toujours passé après son amour de la musique, elle ne pouvait pas le nier. Elle détourna seulement le regard lorsqu'elle senti soudainement quelque chose dans son cou, sursautant légèrement, avant qu'elle ne réalise qu'il s'agissait simplement de Matt, la boule de poils que Kit avait prit avec lui avant de s'installer sur le canapé. Elle s'arrêta directement de bouger, amusée par la situation, alors qu'elle se retourna vers Kit qui essayait déjà de reprendre le rongeur dans ses mains. Il releva finalement la tête vers elle, et en un instant, les deux jeunes avaient totalement oublié le documentaire sur Nina Simone, ainsi que Matt. Ils n'avaient clairement jamais été aussi proches qu'à ce moment là. Elle vit Kit regarder ses lèvres alors qu'il mordillait la sienne, et Aubrey aurait voulu arrêter de penser autant et simplement l'embrasser, comme elle avait pensé à le faire tellement de fois avant ce moment. Mais Kit se redressa légèrement, et Aubrey réalisa qu'elle ne pouvait tout simplement. Son regard resta rivé sur le jeune homme, incapable de bouger, jusqu'à ce que la porte d'entrée s'ouvre subitement, faisant à nouveau sursauter la jeune chanteuse. — Merde, jura-t-elle en voyant deux jeunes entrer dans l'appartement, s'embrassant comme s'ils étaient seuls, et le rouge monta une nouvelle fois aux joues d'Aubrey. Elle se leva rapidement, mal à l'aise, et suivit Kit du regard alors qu'il alla chercher de quoi la ramener chez elle.

Kit n’était pas forcément mal à l’aise. Il avait l’habitude de voir son meilleur ami et colocataire surgir avec une femme, prêt à passer à l’acte. Ce qui l’embarrassait, c’était qu’Aubrey voit cela et se mette à penser qu’ils faisaient ça chaque semaine. Son meilleur ami observa Aubrey avant de le regarder, lui. Kit leva les yeux au ciel. C’était certain, il aurait le droit à un interrogatoire, ultérieurement. Kit tendit un blouson de moto plus petit que les autres à la jeune femme puis un casque qui appartenait à Elba lorsqu’elle faisait des virées avec Dane. Kit se passait du sien, pour sa part, bien que cela soit inconscient et ainsi, il se contenta de simplement enfiler son blouson de moto. « Envoie-moi un sms quand j’peux rentrer » signala-t-il à son ami avant de sortir de l’appartement, Aubrey sur ses pas. Il se dirigea vers un petit garage, dans la résidence, qu’il louait pour garer sa moto, de façon sécurisée. Il ouvrit la porte et alla tirer sur la bâche couvrant son engin à deux roues. De la fierté brillait dans son regard. Il adorait sa bécane. « Tu n’as pas peur ? », demanda Kit afin de s’en assurer. Puis, le pianiste se tourna vers Aubrey pour l’aider à régler son casque afin qu’il soit le plus sécurisant possible. « J’irais lentement ». Parce que seul, Kit avait tendance à rouler hors des limites, il ne pouvait pas nier le contraire.

Toujours assez mal à l'aise, la chanteuse regarda son ami prendre des affaires dans un placard, alors que le petit couple ne semblait attendre qu'une chose: qu'ils déguerpissent une bonne fois pour tout. Kit avait l'air tellement habitué à ce genre de situation, il avait géré la situation avec un calme troublant, alors  qu'Aubrey n'arrivait même pas à articuler deux mots. Elle se rapprocha de Kit, attrapant le casque et le blouson qu'il lui tendait, et ils quittèrent l'appartement. Aubrey s'autorisa à sourire légèrement au petit couple, qu'elle serait peut-être un jour amenait à revoir, si elle continuait à trainer toujours autant chez le jeune pianiste. Elle fini par suivre Kit, toujours dans le silence, jusqu'au garage, où elle découvrit la moto du jeune homme. Aubrey n'était jamais monté à moto. Elle n'avait en réalité jamais fréquenté quelqu'un qui en possédait une, encore moins un homme. Elle enfila le blouson et le casque avant que Kit ne se retourne vers elle pour l'aider. — Bien sûr que si, j'ai peur, lâcha-t-elle avec un petit sourire amusée, de quoi rassurer Kit. — Je suis jamais monté à moto, mais j'te fais confiance.

Kit jubilait. Prendre quelqu’un en moto signifiait que la personne allait s’accrocher à lui et en ayant peur, Aubrey le ferait sans doute plus fort qu’en temps normal, qu’un habitué. Il sourit, attendri par sa confession. Il chevaucha sa moto et débloqua les calles pieds où Aubrey poserait les siens. Il mit le contact pour faire chauffer la moto, ne s’amusant toutefois pas à faire rugir le moteur afin de rassurer la jeune femme. « Tu poses un pied sur la calle, tu t’appuies dessus et tu montes. Comme à cheval », indiqua le brun. Il attendit qu’Aubrey s’exécute, la regardant faire dans l’un des rétroviseurs. « Maintenant, tu te colles à moi ; ainsi, le vent ne t’emmerdera pas et avec les accélérations, tu n’iras pas en arrière », dit-il calmement. Il ne comptait pas accélérer brutalement comme il le faisait seul. Ce serait une balade, en fait, très calme et à vitesse réduite. Kit prit le bras d’Aubrey et le positionna contre son ventre, afin qu’elle s’accroche convenablement à lui. Lentement, à l’aide de ses pieds, il recula pour sortir la moto du garage puis démarra, très doucement, vraiment au pas. « Ca va ? » cria-t-il assez fort pour qu’elle l’entende à travers son casque – puisque lui n’en portait pas. « Tu vis vers où ? », demanda-t-il. Car pour la ramener, c’était peut-être mieux qu’il sache où aller, non ?

Elle le regarda monter sur la moto. C'était fou comme il était différent de tous les hommes qu'elle avait pu fréquenter, et encore plus de Niels. On aurait pu croire que c'était une mauvaise chose, mais non. Ça lui plaisait. Elle aimait cette différence, le fait que tout ce qu'ils faisaient ensemble était nouveau pour elle. Elle monta sur la moto derrière lui, comme il lui avait indiqué, riant légèrement lorsqu'elle manqua de tomber. — C'est pas un problème, ça, dit-elle lorsqu'il lui expliqua qu'elle devait se coller à lui pour ne pas tomber. Elle aimait l'idée de rester contre lui pendant quelques minutes, à ne penser à rien d'autre. Kit lui attrapa le bras, le collant contre son ventre, et Aubrey se rapprocha de lui, se collant à son dos alors que ses bras la maintenait contre lui. Inconsciemment, elle s'accrocha un peu plus fort à lui lorsqu'il démarra. Elle hocha la tête lorsqu'il lui demanda si ça allait, lui donnant son adresse en parlant assez fort pour qu'il l'entende. — Prend ton temps, rajouta-t-elle en se détendant légèrement.

Aubrey lui indiqua de prendre son temps si bien que Kit n’accéléra pas. Il continua de rouler au pas, tranquillement, tout en prenant soin de maîtriser ses trajectoires et ses virages malgré le fait qu’il était fortement déconcentré par les bras d’Aubrey autour de son torse. Toutefois, lorsqu’une ligne droite rêvée pour une accélération se profila sous les roues de son bolide, Kit cria : « Accroche-toi » avant de mettre les gaz. Oh, pas une vitesse exagérée, encore raisonnable mais qui changeait de celle de croisière adoptée jusqu’à maintenant. Il souriait. Il adorait la vitesse et encore plus lorsqu’elle contribuait à plaquer le corps fin de la chanteuse contre son dos. Il baissa brièvement les yeux sur les mains de l’artiste, accrochées à son ventre avant de freiner, doucement, sans faire d’à-coups. Finalement et bien trop vite au goût de Kit, ils arrivèrent à l’adresse indiquée par la jeune femme. Il cala la moto sur la bécane et y descendit rapidement, avec agilité, pour aider Aubrey. « Alors, tes impressions ? », demanda-t-il, les yeux brillants d’excitation de lui avoir fait faire sa première virée en deux roues.

Petit à petit, Aubrey se calma. Elle était plus détendu, calme, elle appréciait ce moment. Même s'ils ne pouvait pas parler, la jeune chanteuse adorait se sentir si proche de ce garçon qui faisait emballer son coeur dès qu'il était dans la même pièce qu'elle. Elle resserra son étreinte à nouveau lorsqu'ils arrivèrent sur une ligne droite et que Kit accéléra. Peut-être qu'elle le serrait un peu trop, mais elle ne pouvait pas s'en empêcher. C'était effrayant, mais elle aimait ces nouveautés. Ils arrivèrent finalement à quelques mètres de la maison d'Aubrey et Niels, et avec l'aide du jeune pianiste, elle descendit de la moto avant d'enlever le casque. — Wow ! lâcha-t-elle en se retournant vers lui, un large sourire sur le visage. Kit, c'était dément. J'ai adoré. Elle continua de le regarder avec son grand sourire, heureuse de ce moment particulier, de cette nouvelle aventure. Elle reprit son souffle, toujours un peu euphorique, les cheveux ébouriffés par le casque qu'elle portait juste avant. — Je comprend que tu aimes autant ça, maintenant. Elle continua de le regarder en souriant, heureuse comme elle ne l'avait pas été depuis longtemps.

Pour le plus grand bonheur de Kit, Aubrey semblait ravie et ne cessait de sourire. Il lui sourit en retour, vraiment content du petit effet donné par cette balade en deux roues. « On fera une balade plus longue, prochainement », annonca-t-il avec enthousiasme. Il y avait de superbes routes en sortie de ville, avec des lacets et des virages à vous en donner des palpitations. Il s’imaginait déjà les mains d’Aubrey sur son torse, s’accrochant à lui et ça lui en arrachait des frissons. Kit tourna la tête vers l’imposante maison qui devait vraisemblablement être celle d’Aubrey. Toutes lumières éteintes. Son fiancé était-il là ? Depuis qu’elle lui avait parlé de lui, Kit était intrigué. Qui était cet homme qui avait la chance de partager le quotidien de l’artiste qui faisait battre son cœur un peu plus fort ? « Voilà », conclut-il en enfouissant ses mains dans les poches de son blouson. « Tu as vu un bout supplémentaire de mon univers »

Elle le regarda faire avec toujours ce même sourire. Il semblait heureux, et ça lui faisait plaisir. Il voulait faire une ballade plus longue, et elle ne put s'empêcher d'hocher la tête pour approuver, s'imaginant déjà passer plus de temps seule avec lui, accrocher à son torse comme elle l'avait fait lorsqu'il l'avait ramené chez elle. Mais elle se rappela vite de la réalité des choses lorsqu'il tourna la tête vers la maison de la jeune femme. — Ton univers m'a l'air bien plus fascinant que le mien. C'était la vérité. Il avait beau lui répéter qu'il était mauvais garçon, tout ce qui le concernait lui plaisait. Même si elle savait que leurs différences pourraient être un obstacle pour eux, c'était aussi une des raisons pour lesquelles il était si intéressant. Aubrey regarda à son tour vers la maison où tout était éteint. Elle n'avait aucune idée d'où était son fiancé. Peut-être dormait-il déjà, ou peut-être n'était-il pas encore rentré, malgré l'heure. Il n'avait pas cherché à la contacter, en tout cas. — Je t'inviterais bien à rentrer, mais... Je suis pas certaine... Elle le regarda à nouveau, ne sachant pas exactement comment dire les choses pour qu'il ne le prenne pas mal. Bien sûr, ils n'étaient qu'amis, jusque là. Mais elle savait très bien que son fiancé n'apprécierait certainement pas qu'elle passe la soirée seule chez un ami, et qu'il la ramène chez elle si tard, sur sa moto. Après tout, elle pouvait le comprendre.

Son univers n’était pas fascinant. Il ne montrait que ce qu’il voulait qu’elle voit. Kit ne lui montrait pas les galères avec les flics, il ne lui en parlait même pas bien que la simple mention de son prénom auprès d’un policier raviverait nécessairement des souvenirs et délierait sa langue, il le savait. Kit n’était pas un mec net ni honnête mais il refusait de montrer cet aspect là à Aubrey. Autant se jeter devant les roues d’un camion ou, en l’occurrence, pavaner devant la maison de son fiancé, ce que remarqua aisément Aubrey. « Je ne suis pas certain non plus », compléta Kit d’un ton rieur. Il n’avait pas envie de rencontrer cet homme tant par jalousie que parce que ce n’était pas … convenable, surtout pas après avoir ramené sa fiancée en moto au beau milieu de la soirée. Kit se râcla la gorge. Il ne savait pas comment agir. Cette soirée parfaite bien qu’improvisée touchait à sa fin. Finalement, il se décida et se pencha pour faire la bise à Aubrey, insistant sur la seconde plus que de coutume. « On se voit bientôt », dit-il en ponctuant sa parole d’un clin d’œil tout en grimpant sur son bolide et en démarrant, délaissant là Aubrey sur le pas de sa porte pour s’en retourner faire la tournée des bars en attendant le message de son colocataire, l’autorisant à rentrer.